Avez-vous remarqué, la première chose que fait un boxer en montant sur le ring avant un match est de sautiller et de décontracter/d’assouplir/de relâcher ses épaules ? Quelle en est la raison ? Ne vous inquiétez pas, il y a un rapport avec l’équitation.
L’équitation a de nombreuses similitudes avec d’autres nombreux sports, comme la boxe, les arts martiaux ou la danse. Dans ces sports comme dans l’équitation, la recherche de la décontraction est totalement inhérente à la pratique.
Mollesse vs crispation
Les termes décontraction et contraction sont assez mal compris, en général on associe le premier à de la mollesse et le second à de la crispation. Je vais prendre l’exemple du karate, mais cela est aussi valable dans d’autres autres sports et dans d’autres arts martiaux.
Dans le karate, il ne faut être ni mou, ni crispé, car dans les deux cas le pratiquant est lent et imprécis. Mais si le pratiquant est particulièrement mou, il est instable (mauvais appuis), et risque de se blesser ou de se faire mal.
A contrario, un pratiquant crispé est raide, moins fort, a un mauvais équilibre, manque de concentration et s’épuise, à terme, ces crispations sont sources de douleurs ; enfin à cause du manque de fluidité, le rendu est assez robotique.
C’est la raison pour laquelle un boxeur relâche ses muscles juste avant d’entamer un combat, car la crispation altérerait son efficacité.
Pour le cheval, mollesse et crispation peuvent aller de paire, à cause du manque d’équilibre. En effet, les crispations ne naissent pas seulement dans l’idée de comprimer le cheval en poussant et en tirant, mais aussi dans l’idée de laisser le cheval utiliser son corps, quelque soit sa posture, dans la crainte peut-être de ne plus oser le « toucher », par peur de mal faire aussi.
Ainsi, l’enjeu est de trouver le bon équilibre et de distinguer clairement la crispation et la mollesse de la décontraction et la tonicité.
La décontraction
Un sportif ne peut obtenir de bons résultats s’il s’épuise rapidement, s’il est imprécis ou s’il se fait constamment mal. La décontraction ne signifie donc pas être mou à défaut d’être crispé, mais plutôt d’être efficace en déployant le minimum d’efforts par une série de contractions et décontractions. En d’autres termes, nous pourrions dire que la décontraction, c’est utiliser son corps de façon efficiente, ou encore d’utiliser un muscle sans tension inutile.
Pourrait-on parler d’efficience musculaire ?
Charge et posture
Nous allons vulgariser un peu l’équitation afin d’en comprendre les enjeux sportifs. Voici quelques observations :
- le centre de gravité du cheval est naturellement plus en avant, du fait de sa nature d’herbivore à se nourrir principalement au sol,
- l’équitation est un sport dans lequel on demande au cheval de se déplacer, ou plutôt de faire du sport, avec un sac à dos (le cavalier),
- tout comme pour l’humain, il n’est pas naturel pour le cheval de faire du sport avec le dos chargé. Pour preuve : nous avons tous eu un jour mal au dos après une marche de quelques kilomètres, sac sur le dos. Nous savons également que nous devons être prudents lorsque nous voulons soulever une charge lourde, au risque de se faire mal si nous n’employons pas une posture adéquate. Porter, n’est donc ni naturel pour l’Homme, ni pour le cheval.
Prenons l’exemple de la charge lourde (un carton par exemple). Lorsque nous trouvons face à un carton, le danger premier est de se faire mal au dos. Pour éviter l’accident, il nous le faut soulever en position fléchie, le dos gainé et grandi et rapprocher au maximum ses points d’appui près du carton (l’idée est de se placer au mieux quasiment au dessus de lui). Ainsi :
- les muscles des bras et des épaules soutiennent le carton,
- les cuisses et les muscles fessiers poussent le corps vers le haut,
- et les abdominaux viennent renforcer la chaîne musculaire de la partie haute et la partie basse du corps.
Le point clé central de cette série de mouvements qui permet de soulever le carton sans peine, ce sont les hanches.

Sac à dos et équitation
Le fait de porter du poids grâce au soutien des hanches soulage énormément le corps. C’est d’ailleurs un des principaux critères du sac à dos de randonnée. En effet, le but de ce sac à dos est de reporter un maximum de poids sur les hanches afin de libérer les épaules, cela est possible quand le sac à dos est équipé d’une ceinture lombaire. Cette conception permet de réduire les douleurs de dos tout en garantissant une certaine liberté de mouvements. Mais, le sac à dos ne fait pas tout, il faut aussi une bonne condition physique, sinon cela ne fonctionne qu’à moitié.

Question charge idéale, l’équitation est très proche de celle de la randonnée, car dans les deux cas, les recommandations de l’une et l’autre discipline sont identiques, ce qui donne un aperçu des contraintes imposées au cheval. Ainsi, que ce soit dans la pratique de la randonnée ou de l’équitation, la charge idéale ne devrait dépasser 10% du poids corporel du porteur.
Mais la grande différence entre la randonnée et l’équitation, c’est que l’on demande au cheval de courir, de sauter et/ou de sauter avec sa charge sur le dos.
Et contrairement au sac à dos inerte, fixe et rigide, celui du cheval (le cavalier) est vivant et indépendant.
L’assiette du cavalier a donc un rôle crucial à jouer dans le confort du cheval. Et à ce sujet-là, je n’irais pas par quatre chemin : accompagner le cheval par ondulation du bassin et de la colonne est une aberration. Imaginez : vous jouez avec un enfant en le portant sur vos épaules, vous vous mettez à courir, et s’il se met à gigoter dans tous les sens pour suivre votre rythme. Vous allez immédiatement vous arrêter, car cette agitation vous fera perdre l’équilibre, puis vous lui demanderez de ne pas faire ça et de se tenir plutôt le plus proche et le plus fixement possible contre vous (exactement comme un sac à dos le ferait). De là, vous pourrez continuer à jouer…
Cet exemple pratique se vérifie aussi avec une mesure par capteur de pression et révèle entre autres qu’en cas de non-fixité, les pressions exercées sur le dos du cheval peuvent grimper jusqu’à des centaines de kilos.
Comme pour le sac à dos de randonnée, la fixité est donc un critère de confort absolu pour le cheval.

Conclusion
Si nous récapitulons :
- le cheval doit porter un sac à dos le plus fixe possible,
- il doit pouvoir libérer ses épaules, porter le poids par l’action des hanches, de la sangle abdominale, des cuisses et des fessiers,
- dans cette posture, il soulage à la fois son corps de la charge sur son dos, mais il le rend également plus disponible, plus efficient, sans crispation, ni mollesse,
- un signe de décontraction (efficience musculaire) est la cession de mâchoire (mobilité de la bouche).
Et si nous simplifions :
- dans le cas où le cheval évolue dans un équilibre avant (centre de gravité naturel), il portera principalement son sac à dos avec ses épaules, ce qui aura pour effet de crisper son dos et ses épaules, comme si vous étiez équipés d’un sac à dos sans ceinture lombaire : à la fin de la journée, il est possible que vos massages ciblent directement votre cou, vos épaules et vos lombaires,
- dans un équilibre classique, on cherche à reculer le centre de gravité du cheval afin que celui-ci « porte avec ses hanches », ce qui aura pour effet de soulager son dos et de libérer son avant-main : objectif similaire au sac à dos avec ceinture lombaire.