Article mis à jour le 20 août 2023
Les ulcères gastriques équins touchent énormément de chevaux et pas seulement les chevaux de courses ou de sport. Contrairement à ce qui est souvent partagé, les ulcères ne conduisent pas forcément à l’amaigrissement du cheval ou à des problèmes de comportement, parfois les symptômes sont beaucoup plus sourds et quasi-invisibles.
Pourquoi le cheval est-il sujet aux ulcères gastriques ?
La raison se trouve dans son fonctionnement digestif : le cheval s’alimente en moyenne pendant 16 heures par jour, alors pour digérer tous ces aliments, son estomac produit en continu de l’acide chlorhydrique. Le cheval produit ainsi 1,5 litre d’acide toutes les heures, soit environ 36 litres en 24 heures.
Ce n’est pas un problème si l’estomac est constamment rempli d’aliments, car l’acide va « s’y attaquer ». Mais c’est un problème si l’estomac est vide ou partiellement vide, car l’acide qui stagne dans l’estomac, va alors commencer à endommager la muqueuse protectrice. C’est le début de l’ulcération.
L’estomac est composé de deux parties :
- la muqueuse squameuse : située dans la partie haute, c’est la plus sensible aux éclaboussures acides. 60 à 80% des ulcères gastriques sont situées dans cette partie,
- la muqueuse glandulaire : située dans la partie basse de l’estomac qui est moins sensible, mais pas invincible.
Les chiffres
Comme mentionné plus haut, 50 à 90% des chevaux au travail souffriraient d’ulcères gastriques.
Estimation de chevaux touchés par discipline :
- Courses : 90%
- Chevaux de spectacle : 60%
- Complet : 60-70%
- Jumping : 72%
- Endurance : 93% des chevaux souffrent d’ulcères pendant la saison de compétition contre 48% pendant la saison de repos.
- Polo : 69% souffrent d’ulcères glandulaires et 54% d’ulcères squameux,
Les poulains sont aussi fortement touchés, en effet on estime que 25 à 50% des poulains développent des ulcérations durant le sevrage.
Les ulcères gastriques touchent aussi les chevaux féraux, dans une étude portant sur 51 chevaux domestiques et 27 chevaux féraux, les chercheurs ont déterminé que :
- 22,2% des chevaux féraux et 60,8% des chevaux domestiques avaient des lésions squameuses,
- 29,6% des chevaux féraux et 70,6% des chevaux domestiques avaient des lésions glandulaires.
Les chevaux féraux semblent donc plus sujets aux ulcères situés dans la région glandulaires par rapport aux chevaux domestiques, et les chercheurs ne connaissent pas encore les causes de cette surprenante différence.
SOURCE : TheHorse
Les causes
Les causes d’ulcères gastriques sont assez bien connues :
- le stress : le sevrage, un transport même de courte durée, une compétition, un changement d’environnement…
- le manque de fourrage,
- l’exercice intense et/ou pratiqué l’estomac vide,
- le tic à l’air ou à l’appui (plus d’études doivent être réalisées à ce sujet),
- l’administration d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS).
Les mouches gastérophiles ne semblent pas être responsables d’ulcères gastriques.
Récemment, on a également découvert que la luzerne séchée (celle comme de l’herbe coupée, « chaff » en anglais) peut être une cause d’ulcères glandulaires. En effet, la texture de cette luzerne peut causer des lésions dans la région du pylore. Il n’y a cependant pas de risque lorsqu’elle est distribuée sous forme de granulés.
- Effects of two alfalfa preparations with different particle sizes on the gastric mucosa in weanlings: alfalfa chaff versus alfalfa pellets
- Effects of alfalfa chaff on the gastric mucosa in adult horses
Des symptômes pas toujours évidents à détecter
Les signes les plus connus et reconnus sont :
- un manque d’appétit,
- une irritabilité,
- un manque de performance,
- une mauvaise condition physique,
- des coliques de faibles intensités.
Mais il y a aussi des signaux moins « percutants » :
- dans les signes physiques :
- une salivation excessive,
- des crottins mous,
- dans les signes comportementaux :
- un cheval qui boit moins,
- qui preste couché plus longtemps que d’habitude,
- qui joue avec sa langue,
- qui semble l’air de mastiquer sans manger,
- qui mange plus vite si le repas a été retardé,
- qui fait des rotations avec son encolure,
- qui stresse facilement,
- dans les signes au travail :
- qui réagit au sanglage,
- qui fait des foulées courtes,
- qui réagit négativement à la jambe,
- qui regarde/mord la zone jambe/sangle,
- qui fouaille de la queue.
Même les chevaux avec un poids de forme, gros, voire obèses peuvent être touchés
Une étude italienne réalisée sur 203 chevaux a montré qu’il n’y a pas de lien évident entre le poids et la présence d’ulcères gastriques.
Dans cette étude, les chevaux avaient un score de poids corporel de trois ou plus. Ils étaient normaux, gros ou obèses.
Ils ne faisaient pas d’exercice et étaient soit retraités, se reposant pendant plusieurs mois avant de reprendre un travail actif, soit utilisés à des fins de reproduction (femelles ou étalons), tandis que 77/203 (38 %) étaient montés en carrière ou pour de courtes randonnées une fois par semaine ou moins. Tous les chevaux vivaient soit en paddock, soit au pré, seuls ou en petits groupes, pendant au moins quelques heures chaque jour. Tous les chevaux recevaient de 8 à 10 kg de foin deux à trois fois par jour, avec une petite quantité (1 à 2 kg/jour) d’aliments sucrés (mélange de céréales, maïs, son, mélasse, minéraux et vitamines) administrés une ou deux fois par jour.
Les gastroscopies ont révélées que 137 des chevaux avaient des lésions squameuses, soit 67,5% de l’échantillon. 53 des 203 avaient des lésions glandulaires.
SOURCE : Body Condition Score Is Not Correlated to Gastric Ulcers in Non-Athlete Horses
Dans cette étude, 50% des chevaux de loisirs touchés n’avaient aucun symptôme
Des chercheurs polonais ont étudié 108 chevaux de loisirs, de différentes races et âges et ayant tous accès au paddock la journée. Ces chevaux ont été divisés en deux groupes : ceux qui ne montraient pas de symptômes d’ulcères gastriques (groupe 1, 48 chevaux) et ceux qui montraient des symptômes (groupe 2, 60 chevaux).
Une gastroscopie a été réalisée sur cheval cheval afin d’évaluer et de compter les lésions.
Les résultats ont indiqué que 59% du groupe 1 (sans signes cliniques) avaient des lésions alors qu’ils n’étaient « que » 40% dans le groupe 2. Ces résultats mettent en évidence la difficulté de déceler des ulcères gastriques en s’appuyant seulement sur des signes cliniques.
Un bon poids de forme, un poil brillant et quand même des ulcères !
Dans la continuité de ces chiffres, il y a aussi cette présentation dans laquelle des chevaux en état au poil brillant, ont été diagnostiqués positifs aux ulcères, parfois à des grades sévères.





Comment savoir si un cheval à des ulcères gastriques ?
La gastroscopie (ou endoscopie gastrique) est le seul examen fiable qui permet de diagnostiquer la présence d’ulcères gastriques et d’établir précisément le degré d’ulcération.
Cet examen dure environ 20 min durant lequel le cheval est sédaté. Il consiste à introduire par les voies nasales du cheval, une caméra montée sur une fibre optique de 3 mètres de long. Cet caméra est directement reliée à un écran de contrôle ce qui permet au vétérinaire de faire tous les vues nécessaires au diagnostic.
Pour être réalisée, le cheval devra jeûner pendant minimum 16 heures et son eau devra être retirée 3 heures avant l’examen (le protocole diffère suivant le vétérinaire).
Le diagnostic permettra d’ajuster la posologie du traitement qui est en moyenne de 28 jours.
Une autre technique moins fiable et moins précise : la palpation
Certains professionnels comme de Dr DePaolo ont développé des techniques de palpations qui peuvent aussi notifier la présence d’ulcères gastriques. Attention cependant, le seul examen fiable reste la gastroscopie.
A l’avenir, il y aura peut-être le test salivaire
Dans cette étude récemment parue, les chercheurs ont évalué l’efficacité d’un test salivaire dans la détection d’ulcères gastriques. Ces tests existent déjà mais ne sont pas encore commercialisés pour les chevaux.
Ce biomarqueur a l’avantage d’être moins invasif, moins couteux et moins contraignant d’un point de vue logistique que la gastroscopie.
Conclusion
Les chiffres récents nous montrent que les ulcères gastriques touchent tous les chevaux, mêmes ceux qui reçoivent une bonne quantité de foin, qui vivent de dehors, qui ne font rien… Il suffit même que le cheval soit sevré pour qu’il développe des ulcères. Les chiffres récents sous-entendons aussi que nous estimons le problème, alors en cas de doutes, consultez donc votre vétérinaire.
