Problèmes de comportement chez la jument : les ovaires sont-ils toujours en cause ?

Les problèmes de comportement chez la jument ont-ils un lien avec ses ovaires ?

Le cycle œstrien de la jument

La jument présente généralement des chaleurs durant les beaux jours, entre fin mars et fin août. Son cycle dure en moyenne 21 jours comprenant :

  • une phase d’œstrus de 6 à 8 jours : ce sont les « chaleurs »,
  • une phase de diœstrus : période de repos durant laquelle la jument refuse le mâle.

Son cycle est arrêté durant le reste de l’année, c’est l’anœstrus.

Les problèmes de comportement sont-ils liés à leurs ovaires ?

Lorsque les propriétaires rencontrent des problèmes avec leur jument, ils pensent souvent à l’ovariectomie, c’est-à-dire à une ablation des ovaires. Ont-ils raison ?

De plus en plus de scientifiques affirment que dans bon nombre de cas, l’ovariectomie n’a ou n’aura aucun effet sur le problème rencontré. Dans ces nombreux cas, ils ciblent des problèmes d’inconfort liés à un équipement mal adapté, des troubles musculosquelettiques, des problèmes dentaires, digestifs, urinaires… ou encore une privation de sommeil.

En 2017, lors de la « American Association of Equine Practitioners convention », Sue McDonnell PhD a parlé de trois cas rencontrés lors de ses visites. Dans le premier, la jument était atteinte d’une adhérence sur sa vessie et d’une tumeur sur son ovaire ; dans le deuxième, une impaction gastrique et dans le troisième, un inconfort dû à l’électricité statique. Dans sa carrière, elle a rencontré peu de troubles d’origine ovarienne. Et dans trois-quart des cas, l’ovariectomie n’aurait rien changé, car les causes étaient souvent multiples.

Lors de cette même conférence, James Crabtree, BVM&S, CertEM, MRCVS, directeur du service de reproduction équine au Royaume-Uni a a examiné la littérature des 30 dernières années et a identifié quatre documents importants. Sur la base de ces documents, Crabtree a déclaré « l’ovariectomie pouvait même aggraver la situation, car les comportements reproducteurs peuvent alors devenir irréguliers ou persistants. »

Plus généralement, « un comportement indésirable est souvent mieux géré par un traitement médical ou une gestion de cycle.

Les juments agressives peuvent être candidates (pour l’ovariectomie), mais il faut d’abord explorer d’autres causes. Quelle qu’en soit la raison, les propriétaires doivent être conscients que le comportement lors des chaleurs peut persister. »

Les juments sont tout aussi faciles que les hongres

Une étude australienne a interrogé 1200 cavaliers et les résultats ont révélés des faits très intéressants :

Ils ont trouvé que la plupart des questions avaient une différence de moins de 5% dans le score global entre les juments et les hongres, a déclaré Kate Fenner, PhD. Dans les quelques situations où la différence était plus importante, les hongres ont souvent obtenu des scores plus élevés concernant les comportements indésirables. En particulier, les hongres ont 20 % plus de chances de mâcher leurs cordes lorsqu’ils sont attachés, 12 % plus de chances de mâcher leurs tapis/tapis de selle, 12 % plus de chances de ne pas rester immobiles, et 10 % plus de chances de pousser les cavaliers lorsqu’on leur offre de la nourriture, a-t-elle dit. Les juments, en revanche, ont 10 % plus de chances de s’éloigner lorsqu’on les attrape.

« Nous avons constaté quelques différences de comportement liées au sexe, mais elles étaient toutes liées à des situations non conflictuelles », a déclaré Kate Fenner, PhD. « Et contrairement aux idées reçues, ce n’était pas les juments qui étaient plus compliquées dans ces cas, sauf pour se faire prendre dans l’enclos. Ce sont les hongres qui montraient ces comportements largement indésirables ».

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Conclusion

Il existe peu d’études sur les problèmes de comportement chez les juments, mais la littérature montre que l’ovariectomie n’est pas toujours une solution salvatrice et ne stoppe pas systématiquement les comportements reproducteurs.

Sans oublier que dans de nombreux cas, les ovaires ne sont même pas l’origine du problème, il est donc important de réaliser des examens approfondis et des observations prolongées avant toute décision.

Remarque

On a tendance à oublier que les juments sont des êtres entiers et que bien souvent, les propriétaires n’ont pas les outils adéquats pour gérer leurs comportements reproducteurs ou cibler eux-mêmes les causes de leur comportement négatif (comme par exemple la boiterie ou le mal de dos).
Il est fréquent d’incriminer les ovaires et d’accabler les juments en les réduisant à des « pisseuses » ou à des « morues »…

Cela nous rappelle qu’il fut un temps, des croyances pseudo-scientifiques attribuaient des maladies propres aux femmes et en lien direct avec leurs organes reproducteurs…
Évitons ce genre de raccourcis et apprenons plutôt à accepter l’expressivité de nos juments.

Et surtout, lorsque nous sommes confrontés à un problème, ayons le réflexe d’élargir nos champs de recherches.