L’effet d’ensemble | Isa Danne

Voici ce que je cherche dans mon équitation, dans le travail de mes chevaux et des chevaux que l’on me confie. Je vais essayer de décrire les étapes qui donnent accès à l’effet d’ensemble et expliquer pourquoi c’est un chemin que j’estime indispensable.
Faire le choix d’une équitation fine et légère c’est devoir maitriser l’effet d’ensemble a moyen terme c’est important si vous souhaitez des chevaux fonctionnels et harmonieux sous votre selle.
C’est une vision de l’éducation la plus adéquate pour qu’un cheval porte correctement son cavalier et ne souffre pas dans son corps de l’activité « équitation » à moyen ou long terme.

Première étape

Les jambes et les mains séparément « mains sans jambes et jambes sans mains », tellement connu, répété mais si peu pratiqué.
Pour mettre en place cette célèbre phrase il faut être très rigoureux et avoir un bon sens du timing. Ce qu’il faut comprendre c’est qu’il n’y a jamais pour but final un contact constant dans l’équitation classique. Cependant ça ne veut pas dire que cela n’arrive pas, à certain moment, d’avoir et de maintenir volontairement un contact (avec toutes les nuances que cela impliques) mais avec pour idée qu’il finisse par se rompre dès que le cheval retrouve le bon équilibre (ça ne dois jamais durer, sinon c’est que le rééquilibrage ne fonctionne pas, il faut alors éventuellement proposer un autre exercice ou revoir sa manière de faire), généralement si c’est bien fait votre cheval donne la cession de mâchoire. C’est pour cette raison qu’il ne peut être juste de maintenir volontairement sur toute la durée du travail un contact constant, il ne peut être qu’une étape a un instant du travail mais en aucun cas une finalité.

Les jambes
Elles ont deux valeurs, l’impulsion et, disons, la direction des hanches/postérieures.
Jambes pour l’impulsion: je mets mes jambes, aussi légèrement que sur mes chevaux les plus éduqués c’est-à-dire contact avec le haut du mollet face interne et une pression qui pousse à peine le poil. J’attends comme réponse de mon cheval qu’il soit réactif instantanément et si ce n’est pas le cas j’utilise alors le stick (stick utilisé uniquement pour l’impulsion, si je pouvais m’en passer totalement avec les mêmes résultats je le ferais… je cherche toujours dans la technique le moyen de m’en passer le plus possible).
Jambes pour l’abaissement des hanches: abaissement lié à une demande d’impulsion plus grande sur des hanches assouplies par le travail gymnique.

Jambes pour le croisement des postérieurs : croisements améliorés par les gymnastiques classiques, je précise que la qualité de réponse que vous donnera le cheval est en étroit lien avec l’équilibrage que demande la main à ce stade je ne décris pas comment on en est arrivé la mais il y a beaucoup de travail en amont évidemment (dans tous les cas dites-vous que mettre plus de jambes est toujours une mauvaise idée.

Ce qu’il faut comprendre c’est que sans équilibre (la main) les hanches et postérieurs ne peuvent pas être correctement disponibles, ni latéralement ni dans leur abaissement et donc la chance d’obtenir un rassembler juste est très réduite.

La main
Équilibre latéral et longitudinal (abaissement des hanches en lien avec l’impulsion adéquat) et direction (épaule et hanches en latéral).
Dès les premiers pas du cheval sous la selle (ou en main à pied) le travail du cavalier doit permettre d’installer progressivement la barrière de la main, il ne s’agit pas de coincer le jeune cheval dans son bout de devant, cela doit se construire dans le temps. Sur les jeunes je laisse pas mal les rênes floches quand ils sont la ou je veux et je ne mets la mains que pour rééquilibrer.

Pourquoi cette « barrière », cette main fixe ?
Sans barrière a respecter à part s’y appuyer, ce qui rigidifie les chevaux la plupart du temps, il y a un lien qui ne se fait pas avec les hanches et leurs abaissements, cela impacte négativement l’acquisition du rassembler parce que l’équilibre ne peut être précis et surtout autonome donc incomplet. Elle n’est qu’une pression constante (contact constant dans la bouche) et mouvante (main qui suit le balancier de l’encolure au pas et galop, ou mains non fixes) et donc ne peut pas jouer son rôle sur l’équilibre, qui mène au rassembler c’est à dire qu’elle ne se connecte pas aux hanches pour obtenir leurs abaissements. Je mets tout de même un bémol à ce que j’écris, il faut que le cheval comprenne aussi qu’il doit suivre cette main ou qu’elle soit mais sans y peser c’est un des fondamentaux. Ou que vous placiez cette « barrière » le cheval doit aller vers elle.
Il est vrai que pour se déplacer au naturel le cheval se sert de son encolure, il projette du poids vers l’avant par son mouvement d’encolure créant ainsi un déséquilibre qui lui permet d’avancer ses antérieurs, c’est dans la nature un déplacement économique, le poids est sur les épaules pas sur les hanches. Mais dans ce cas c’est un cheval nu, sans cavalier, sans poids sur son dos à porter et c’est bien différent pour un cheval qui porte un cavalier et qui doit travailler, se livrer dans son corps, etc, ect sans risquer la tendinite ou une usure prématurée de ses articulations. Quand le cheval est monté il doit porter une charge (le cavalier) et de surcroît se mouvoir sous contrôle de celui-ci. Donc il doit pouvoir organiser son fonctionnement à hauteur de ces nouvelles contraintes.

Pour pouvoir porter il faut qu’il transforme son fonctionnement naturel qui ressemble, disons à une traction avant, en un fonctionnement qui serait une propulsion arrière.
Prenez comme image l’ouvrier qui doit ramasser et porter un sac de sable posé au sol, il doit plier les jambes et mettre son poids au dessus de ses pieds d’une certaine manière il se rassemble au-dessus de ses postérieurs, il ne doit pas faire le dos rond et au contraire le gainer pour ne passe se blesser à moyen ou long terme.

Pourquoi ce rééquilibrage ?
Cette propulsion arrière, si je fais un gros raccourci, permet en fait au cheval de vraiment porter son cavalier,
par la pousser vers l’avant et l’abaissement des hanches (verticalité) (n’oublions pas le rôle de la main), donc l’étirement du ligament supra-épineux (du garrot vers l’arrière-main : abaissement des hanches donc allègement de l’avant-main) et rondeur du bout de devant (avec étirement du ligament nucal du garrot vers la nuque) c’est ce qu’on appellera « le rassembler ». On ne peut l’atteindre juste que grâce à un bon équilibrage (la main), à toutes les gymnastiques classiques (bien comprises) et à l’impulsion adéquat (j’insiste).

Juste un petit mot sur les résistances, que vous racontent elles ?
C’est souvent lié a un équilibre et/ou impulsion défaillant, cela peut être aussi du a un manque de souplesse (sous réserve qu’il n’y ai pas de problème de santé).
Donc quand il y a résistance du cheval (bouche dure, tension sur une ou les deux rênes, non-respect de la jambe, cheval qui tire, précipite…), il faut lui proposer un exercice qui lui permettra de retrouver l’équilibre (exercices de deux pistes, transitions, reculer…) y associée l’impulsion juste (qui ne sera pas contre productif c’est à dire trop ou pas assez), le dosage juste de ces deux paramètres redonne la souplesse et donc la légèreté. Il est important de souligner que pour avoir la main fixe il faut avoir une position exemplaire, c’est une des clés majeure d’une équitation supérieure qui permettra au cheval d’évoluer vers un meilleur équilibre et un fonctionnement harmonieux.

Lorsque le cheval a appris la valeur des jambes et des mains, jours après jours, alors plus le travail avance plus l’impulsion et l’équilibre deviennent vibrant et généreux, cela devient une évidence pour lu et une habitude. Il se porte de lui-même en avant à la moindre demande et maintient son impulsion sans aucune demande répétitive de vos jambes (à bannir de votre équitation). Le cheval est alors très fin, il est rompu au travail, connaît bien ses gammes…
Jambes et mains douces = »effet d’ensemble » qui doit être suivi d’une descente d’aide si j’ai bien fait mon travail.

Deuxième étape

Les mains et les jambes ensemble
A ce stade l’effet d’ensemble est une évidence, votre cheval peut y répondre par l’auto grandissement car il a les moyens, physiques et psychologiques, de satisfaire la demande du cavalier sans stress. Votre cheval sera de plus en plus à l’aise dans son équilibre vertical, qui apportera du rebond à toutes vos allures et augmentera le niveau de rassembler.
Alors qu’un cheval qui colle à la main et est froid aux jambes ne peut pas comprendre qu’il peut s’auto-grandir vers le haut et d’une certaine manière se soustraire aux « mains et jambes ensemble », pour y arriver la finesse est une clés indispensables.

Voilà, ce que vous sentirez si vous arrivez jusque-là.
Par exemple votre cheval perd l’équilibre, je parle, a ce niveau, de grammes (sensations) sur une épaule plus que l’autre. Alors si la porte (la main, la rêne) reste fermée et que vous mettez les jambes (doucement) à ce moment le cheval va tout simplement mettre plus d’impulsion, d’énergie, de moteur et également abaisser ses hanches puisque la porte devant est fermée, en fonction d’où vous mettez le poids latéralement et longitudinalement il abaissera la hanche qui est dans la diagonale de l’épaule surchargée pour qu’elle reprenne sa part de poids, permettant garrot de monter et donc on obtient un relèvement de l’avant-main, c’est à ce moment que de lui-même il passe au-dessus de la main (différent de derrière la main ) tout en restant rond et ultra vibrant, sensible à toutes les demandes de son cavalier. c’est aussi cette résolution de la rectitude qui permet cette légèreté et donc le rassembler, la rectitude est un chemin de croix !

Je précise à nouveau qu’il y a une très grande différence entre un cheval léger devant les jambes: rassembler et un cheval léger derrière les jambes et la main : faux rassembler.
Si vous arrivez là avec votre cheval c’est qu’il a été bien éduqué à ployer les hanches et les articulations basses de l’arrière-main, car il respecte la barrière de la main et tient son impulsion seul (la plupart du temps).
L’abaissement des hanches, n’est possible que parce qu’il y a contraction abdominale (grâce à la prise d’équilibre sur une base impulsive correcte), cela provoque du coup l’étirement du ligament supra-épineux (le bout de devant est aussi à compter dans l’équation évidement, ligament nucal), accroché au garrot jusque vers l’arrière-main, là nous pouvons parler de « montée du garrot ». C’est ainsi uniquement que votre cheval pourra dédier toutes ses forces à son cavalier sans en souffrir dans son corps à court ou long terme.

En vérité beaucoup de gens pensent que c’est un effet contraire aux célèbres mains sans jambes et jambes sans mains, mais il n’en est rien, car en fait il en est le prolongement logique. Le cavalier passera de l’un à l’autre en fonction des besoins de son cheval, avec aussi les descentes de jambes et de mains. Si l’effet d’ensemble ne fonctionne pas sur votre cheval, c’est que le travail en amont, l’éducation de base (main sans jambes et jambe sans main) n’a pas été bien comprise et surement du coup par correctement expliqué à votre cheval !

Il faut bien comprendre que les chevaux éduqués dans une équitation de contact constant sans recherche d’équilibre réel ne peuvent pas non plus y répondre… Alors à vous de choisir ce que vous voulez, danser ou porter votre cheval !